Un ange attend.
Sur qui, désormais, l'ange veille-t-il ? Que porte-t-il désormais, lui le messager ?
Un peu plus de vingt années nous séparent du moment admirable où l'on vit un ange aimer une trapéziste et devenir homme pour elle. Il était devenu évident que la seule bienveillance inépuisable que les anges éprouvaient envers les hommes ne les satisfaisait plus. Découvrir la mortalité, non plus comme le lot tragique des autres - les hommes-, mais comme ce que l'on choisit pour devenir un avec une autre, était soudain devenu l'expérience ultime. Encore fallait-il que le monde humain reste peuplé, et qu'il garde pour une forme de transcendance un regard, confiant ou inquiet, aimant ou interrogatif.
Il n'en est peut-être plus ainsi. Incarné, visible, il s'est installé dans un monde dépeuplé, qui l'ignore, un monde dans lequel on s'abrite derrière des grilles, on se réfugie au plus vite chez soi, de crainte que l'étranger cherche à s'y installer. Les bancs publics n'accueillent plus personne. Méfiance et isolement ?
L'ange médite. Attend qu'on lui parle. Que l'on écoute ainsi le message de sa simple présence : tout n'est pas donné, il y a un ailleurs, non pas caché, mais à faire exister. Pour exister.