S'étonner, plutôt que chercher à maîtriser.
A quoi bon ce dont l'inutilité est manifeste ? Si nos objets existent d'abord par leur fonction, pour remplir la ou les tâches auxquelles chacun est ordonné, ils ne deviennent vraiment humains, nos objets, qu'en perdant leur utilité tout en restant indispensables. Parce que dans la perte de forme qu'imposent les intempéries, les usages répétés, ils acquièrent une autre présence. Ou plutôt une véritable présence. Le métal, qui s'oxyde, gagne une forme imprévue, difficile à décrire. Il déploie, grâce à l'action de la nature, une capacité à devenir autre, pas simplement une chute : une puissance d'inventer des formes et d'exprimer des couleurs. Il y a soudain de la nature dans les objets artificiels. Comme elles ils découvrent leur véritable pouvoir de séduction. Ces objets rongés par la rouille deviennent indispensables : ils révèlent les limites de notre maîtrise, et notre capacité à nous étonner.